Début mars, j’ai eu la chance de pouvoir assister à la conférence de presse organisée par la Confédération Nationale de la Boulangerie – Pâtisserie Française représentée par Jean-Pierre Crouzet son président avec notamment Martine Pinville, Secrétaire d’Etat chargée du Commerce, de l’Artisanat, de la Consommation et de l’Economie sociale et solidaire et Lionel Deloinge, Président de l’Association Nationale de la Meunerie Française afin de nous informer de la prochaine fête des pains du 23 au 29 mai 2016.
La pain, un pilier de la culture française
Parmi les sujets abordés, on nous présente un métier artisanal. On évoque la variété des pains et le besoin de recherche de farines de qualité.
Symbole de savoir faire d’une filière toute entière, les meuniers sont liés avec les boulangers depuis toujours. La sélection des céréales par les meuneries est un facteur primordial pour la fabrication du pain et pour répondre aux attentes des boulangers.
La France est un grand pays producteur de céréales et notamment de blé.
A cette occasion Anthony Bosson, artisan boulanger fondateur des trois boulangeries parisiennes L’Essentiel a réalisé une multitude de pains plus beaux et originaux les uns que les autres et était présent pour parler de son métier auprès d’un public de journalistes. Il avait préparé une collection de pains prêts à déguster afin de nous montrer la diversité des pains, leurs textures, leurs goûts, leurs couleurs etc.
Parmi les discussions pendant la conférence de presse, j’ai retenu que le pain n’est pas que la baguette française, on le trouve dans le monde entier sous des formes diverses et variées. On trouve par exemple du pain aux pistaches, aux amandes qui bousculent les codes des pains. Les boulangers ont un rôle d’éducation de leur clientèle afin de leur faire découvrir des nouveaux goûts, textures, pains d’origines différentes mais ils doivent également expliquer cette démarche aux consommateurs.
Comme vous le savez, je suis très attachée aux valeurs du fait-maison, (je me suis même lancé un défi assez original que vous pouvez retrouver ici). Aussi j’ai profité de cette occasion pour creuser la question qui me tenait à cœur depuis des mois à Anthony autour de la boulangerie française : achète-t-on toujours du fait maison chez un artisan ?
Anthony a eu la gentillesse de me recevoir dans sa boulangerie du 13ème arrondissement de Paris, à deux pas du métro Olympiades un vendredi matin afin de répondre à mes questions et me faire visiter les lieux. Quel bonheur d’avoir la chance de pouvoir discuter en toute honnêteté avec un artisan et chef d’entreprise passionné et de passer derrière la boutique pour visiter le fournil et le labo à la rencontre des boulangers et pâtissiers en plein rush pour finir leur mise en place de la matinée. J’ai été ravie de rencontrer des hommes passionnés par leur métier, fiers de perpétuer un savoir-faire et ayant l’envie de se dépasser pour toujours progresser dans leur métier.
Messieurs, un grand bravo pour votre dynamisme, motivation et envie de faire partager votre passion !
Quelle-est votre vision de la boulangerie française ?
C’est un métier porteur en France et à l’international. Le métier de boulanger est un véritable ascenseur social, un CAP suffit pour se lancer. Il faut juste avoir l’envie de bien faire, à partir de là, tout est possible.
« Le pain appartient à tout le monde, je ne suis pas pour l’élitisme de la boulangerie ni pour la « starification » des boulangers. Il faut penser à tout le monde, chacun est libre d’aimer et d’acheter le pain qui lui fait plaisir. Il en faut pour tous les goûts. »
Du côté des boulangers, « c’est un métier de passionnés, il faut être honnête avec soi-même et avec ses ambitions personnelles. Ensuite, il n’y a pas de limites »
Anthony a pris le parti de proposer des produits à tous les prix, de la baguette classique à 0,95€, au mini croissant à 0,80€ pour que les personnes qui n’ont pas les moyens de s’acheter un croissant classique puissent se faire plaisir avec un produit de qualité. Une démarche altruiste et très ouverte envers ses clients.
Le fait-maison est-il encore possible ?
C’est la première raison qui m’a motivée à solliciter cette interview auprès d’Anthony. On voit trop de boulangeries ou les viennoiseries ne sont pas faites sur place et pourtant vendues en tant que tel. Quel est l’envers du décor ?
« Aujourd’hui on trouve des aides pour les boulangers, ces produits ont pour conséquence d’abaisser le niveau de compétences des artisans boulangers en leur permettant de prendre des raccourcis. Cela leur permet de réduire le temps de production et d’obtenir une régularité dans leurs produits. Les farines en question comportent des additifs, des correcteurs et des conservateurs qui permettent de stabiliser les produits pour que le travail du boulanger ait moins d’impact et pour « réussir » sa production à tous les coups. Les variations de température, d’humidité, de temps de pousse etc. n’ont plus le même impact que dans la boulangerie traditionnelle sans l’utilisation de ces farines. »
Bien que ces produits ne soient pas entièrement naturels, ils seront estampillés « fait-maison » par un artisan sans que vous ne vous en doutiez une seconde. Anthony m’a montré les catalogues commerciaux qu’il reçoit et qui sont destinés à l’attention des artisans boulangers – pâtissiers, l’offre est effrayante. On trouve des quantités invraisemblables de viennoiseries, des farines remplies d’aditifs, des crèmes pâtissières prêtes à l’emploi etc. L’offre est large et bien présentée, en ce qui concerne Anthony, il a simplement jeté le catalogue à la poubelle, devant moi.
Anthony ne blâme pas ses confrères qui ont recours à ces méthodes, les marges des boulangers sont serrées, certains ont besoin de ces produits pour palier à des charges élevées de structure ou de main d’œuvre mais reconnaît qu’ils ne font pas tout à fait le même métier et ne les considère pas comme des concurrents.
Le consommateur est responsable de ses choix. Il faut proposer de la boulangerie pour tous les goûts, quand on achète un pain au chocolat dans une station de métro dans un point chaud, on ne peut pas attendre la même qualité que lorsque l’on va l’acheter chez un artisan de qualité. Le prix est le même, le travail complètement différent et les marges opposées mais c’est le choix du consommateur qui prime à la fin.
Quelles ont été les plus grandes mutations dans votre métier ces dernières années ?
Il y a 20 ans c’est l’utilisation du froid pour travailler les températures qui a beaucoup fait évoluer le métier. Il y a 10 ans on a vu l’apparition des boulangeries – traiteurs – sandwiches – plats chauds, cette évolution a permis aux boulangeries de gagner en stabilité financière et de créer plus d’emplois.
L’avenir de la boulangerie selon Anthony est que la boulangerie devienne un lieu de vie. Tout au long de l’interview Anthony a répété « la boulangerie appartient aux Français » c’est un pilier de notre culture, de notre alimentation.
Comment reconnaître un bon boulanger ?
Une question assez large, je le reconnais à laquelle Anthony me répond du tac au tac « avec du bon sens » il faut regarder l’offre, il faut accepter que la boulangerie ne propose pas tous les produits tout le temps car il y a des temps de pause et de production à respecter. Il faut aussi faire marcher le bouche à oreille et faire confiance à ses impressions.
Comment réaliser un croissant fait maison ?
Tout commence par la sélection des matières premières avec uniquement des ingrédients de qualité. On pétrit la pâte, on passe ensuite au pointage (qui va permettre à la levure de devenir plus forte), on bloque au froid la pousse et on incorpore le beurre bien froid à la même température que la pâte dans un pliage en portefeuille. Un tour double et un tour simple. On laisse reposer la pâte entre 30 minutes et une heure au froid puis on l’abaisse au laminoir avant de détailler les croissants. Pour la découpe c’est simple il en existe autant qu’il n’y a de boulangeries ! Le façonnage dépend des régions et de chaque entreprise. Qui a dit que les classiques devaient-être uniformes ? Enfin on passe à la cuisson 15 minutes à 172 degrés.
Pour résumer : faire un bon croissant ne s’improvise pas, cela demande des années de pratiques et des compétences précises. Quand on achète un croissant 1,10€ dans une boulangerie on achète des heures de travail et des années d’expérience. Gardons cela en tête afin de valoriser le travail de nos artisans passionnés par leur métier entièrement dédié à notre plaisir.
Pour avoir goûté le croissant de l’Essentiel, c’est simple, c’est un des meilleurs que je n’ai jamais goûté. Frais, moelleux, croustillant, tout y est.
Quelle est la différence entre la levure et le pain au levain ?
Il y a quelques semaines j’avais eu une discussion inattendue avec un médecin gastro-entérologue à propos des allergies au gluten. Ce médecin avait un point de vue très intéressant sur la question et était convaincue que la plupart des personnes qui se disaient intolérantes au gluten étaient à priori davantage intolérantes aux levures industrielles plutôt qu’au gluten lui-même. J’ai profité de l’occasion pour demander à Anthony quelle était la différence entre levure et levain.
La levure est issue du développement d’une bactérie avec de la mélasse, de l’eau et du sucre dans un milieu chaud et humide. La levure est produite en usine et les boulangers l’achètent directement. C’est la même levure que nous achetons si nous souhaitons réaliser du pain maison.
Le levain est une bactérie développée en interne par le boulanger lui-même, sans aucun ajout chimique. On peut réaliser un levain à base de cidre et de seigle par exemple et rafraîchis avec des ajouts d’eau fraîche. Il faut ensuite cultiver le levain dans un milieu régulé en respectant le PH. C’est ce qui va donner le goût spécifique du pain au levain, chaque levain est différent dans sa fermentation et le boulanger devra adapter son travail en fonction de lui.
Vous l’avez compris, cultiver du levain demande du temps, des compétences car il n’y a pas d’aditifs ni de correcteurs.
Quelle est l’évolution de votre métier ?
Selon Anthony la boulangerie va devenir davantage un lieu de vie qu’un lieu de passage. Consommation de café, de plats cuisinés, des prestations traiteur, dans une ambiance crée par des hommes et des femmes de métier. L’offre doit être différenciée entre la vente sur place et à emporter.
Il faut vraiment imprégner les clients dans l’ambiance des lieux et créer un lieu qui ne ressemble à aucun autre. Pour cela, le choix de l’emplacement est déterminant. Ce qui est de plus en plus difficile à Paris compte tenu du prix de l’immobilier. Quoi qu’il en soit, le métier de boulanger et le secteur de la boulangerie sont évolutifs et vont être amenés à évoluer en suivant les besoins et les attentes de leurs consommateurs.
Qu’on se le dise, les boulangers passionnés n’ont pas fini de nous surprendre, pour notre plus grand plaisir !
Une fois l’interview terminée, Anthony m’a laissée visiter la boulangerie et la pâtisserie à ma guise, accompagnée par Jean-Pascal son Chef boulanger et Samuel son responsable pâtissier. J’ai eu le sentiment de bénéficier d’un privilège exceptionnel, je me suis sentie immergée dans un monde secret, l’arrière d’une boulangerie, c’est un bonheur à découvrir ! Un grand merci à Anthony et son équipe pour leur accueil chaleureux !
Visite du fournil :
Portionage des pâtons :
Cuisson des baguettes tradition
On ne traîne pas en boulangerie, le rythme de travail est soutenu et dynamique
Le pain nécessite des temps de repos pour lever
Et cela en vaut la peine !
Passage en pâtisserie avec Hugo l’apprenti pâtissier
Ce matin c’est mise en place de chouquettes maison
Et voila le résultat en boutique, plutôt appétissant ! Avec le grand sourire de Salima la responsable de vente elles sont encore plus belles.
Samuel le responsable pâtissier, dont je n’ai malheureusement pas la photo m’a confié avec enthousiasme toute sa fierté d’avoir eu la chance de participer à l’ouverture de cette troisième boulangerie l’Essentiel. Quel bonheur de rencontrer des personnes motivées par leur métier et animées par l’envie de bien faire et de faire plaisir.
Je suis admirative de la beauté et de la qualité des pâtisseries proposées par la boulangerie L’Essentiel à des tarifs plus que raisonnables.
Des éclairs fait maison, vous connaissez maintenant une bonne adresse ou vous fournir
Du plus sophistiqué au plus simple, on va à l’essentiel, c’est le mot d’ordre de la maison
Coup de coeur personnel pour le pain à la farine de quinoa que j’ai pu goûter, un délice très original avec une belle croûte bien croustillante et une mie aérée et moelleuse. Je vous conseille vivement d’y goûter.
Des pains plus beaux les uns que les autres qui donnent envie de passer à table de de les partager avec ses proches autour d’un bon repas ou d’un petit déjeuner gargantuesque.
Pour clôturer cet article dédié au pain, ne manquez pas la fête des pains du 23 au 29 mai 2016 avec notamment un fournil éphémère sur le parvis de Notre dame dans le 5ème arrondissement de Paris du 21 au 30 mai.
Sous un chapiteau de 1200m2 seront installées l’équivalent de 6 grosses boulangeries avec des animations pour les enfants afin de leur montrer le processus de fabrication des pains.
L’objectif de cet événement est le partage de valeurs, d’expériences, d’histoire par des anciens, des apprentis des écoles, compagnons, meuniers, apprentis, nutritionnistes. Le concours de la meilleure baguette de tradition française au niveau régional et national aura également lieu à ce moment avec la remise du prix de la meilleure baguette de Paris et la remise du prix du meilleur croissant au beurre de France. Un événement qui s’annonce intéressant pour tous les amoureux du pain, à ne pas manquer !
Et pour goûter aux pains, viennoiseries et pâtisseries de la maison l’Essentiel, vous avez le choix entre 3 adresses :
L’Essentiel, 2 rue Mouffetard, 75005 Paris
L’Essentiel, 73 rue Auguste Blanqui, 75013 Paris
L’Essentiel, 89 bis rue de Tolbiac, 75013 Paris